Paris, le 30 Novembre 2022
Parmi les acteurs et actrices de la lutte contre le VIH-sida, personne n’ignore ce que représente le Rapport Hirschel (ou « Avis suisse »). Le 1er décembre 2007, il y a quinze ans jour pour jour, il affirmait pour la première fois qu’une personne vivant avec le VIH, avec un traitement efficace et une charge virale indétectable, ne transmettait pas le virus à ses partenaires. Cette annonce aurait dû révolutionner la prise en charge du VIH et sa prévention. Or, quinze ans plus tard, les sondages d’opinions se succèdent et avec eux ce triste constat : l’information ne se diffuse pas auprès du grand public, des professionnels de santé ou de l’action sociale… qui restent marqués par des représentations datant des années 1980-1990 concernant le VIH.
Pourtant les preuves scientifiques irréfutables ne manquent pas. De l’essai HPTN 052 (2011) aux deux essais PARTNER 1 et 2 (2014 et 2018), des dizaines de milliers de rapports sexuels (77 000 rien que dans Partner 2 !) ont été étudiés et ont permis de confirmer l’affirmation d’origine : aucune transmission du VIH n’a été observée entre partenaires sérodifférents, hétérosexuels ou homosexuels, avec pénétration vaginale et/ou anale, sans usage de préservatif ni de la PrEP, pendant toute la durée de ces études. Ces essais cliniques étaient présentés par le Pr Gilles Pialoux (Hôpital Tenon) pendant le webinaire organisé par Actions le 21 novembre dernier.
Que faut-il de plus pour que l’information se diffuse plus largement au-delà du microcosme de la lutte contre le VIH-sida ? Pour que le grand public sache enfin que VIH indétectable = VIH intransmissible ?
Les conséquences de cette méconnaissance sont réelles et concrètes dans la vie des personnes qui vivent avec le VIH, parfois depuis plusieurs décennies :
• Elles sont toujours considérées, par une partie de la population, comme des « bombes virales ».
• Elles n’ont parfois pas la chance d’avoir une vie affective et sexuelle satisfaisante, quand elles en ont une.
• Elles sont discriminées dans leur parcours de soins et se voient encore refuser une prise en charge efficace par des professionnel-le-s de santé mal informé-e-s.
• Elles sont discriminées sur leur lieu de travail et l’accès à certaines professions leur est impossible.
• Elles font face à des réactions hostiles quand entrent en EHPAD, par les soignants et les résident-e-s.
Les exemples sont beaucoup trop nombreux. Ce sont autant de discriminations qui nuisent à la santé physique et mentale des personnes concernées, les éloignent du soin et de la prévention, les isolent du reste de la société.
Lors du webinaire organisé par Actions Traitements : « Indétectabilité du VIH : quand la science avance plus vite que les mentalités », les experts présents n’ont pas hésité à affirmer : « le risque zéro existe ! ». Sous-entendu, quand une personne est traitée efficacement contre le VIH il n’y aucun risque qu’elle transmette le virus à son, sa ou ses partenaires. Il est grand temps que ce message soit diffusé le plus largement possible, au-delà du travail déjà fourni par les associations au quotidien sur le sujet.
Aujourd’hui, on emploie encore trop souvent des pincettes, des précautions, des renvois en bas de page ou des limites de toute sorte, pour parler de « VIH indétectable = VIH intransmissible ». Cela nuit à la compréhension du message et crée de la suspicion, du doute, alors qu’il s’agit d’un fait scientifique indéniable : une personne séropositive sous traitement ne transmet pas le VIH à ses partenaires. C’est l’occasion de rappeler que ce ne sont pas les personnes séropositives sous traitement qui transmettent le VIH, mais bien celles qui ignorent leur séropositivité car éloignées du soin ou de la prévention.
C’est par un engagement de toutes et tous, notamment les pouvoirs publics et professionnel-le-s de santé, que le regard doit changer sur la vie avec le VIH, les personnes concernées, ainsi que la prévention. « VIH indétectable = VIH intransmissible » est une information de santé publique. Le risque zéro existe, en matière de non-transmission du VIH, il est urgent de le faire savoir !