Cet article a été ecrit par V.Walter Technicienne d’études cliniques à l’hopital de St Martin. Il fait le compte rendu de l’ASSEMBLEE GENERALE EPF/PRIMEVA/COVERTE qui s’est tenue le vendredi 5 avril 2013 à la faculté de médecine du KREMLIN BICETRE. Il fait le point du suivi des grossesses de mères séropositives et de leurs enfants.

1 – LA PTMEou Prévention de la transmission mère enfant

Introduction
Stéphane Blanche a présenté une petite rétrospective de près de 30 années de VIH pédiatrique, puisque les débuts de l’Enquête Pédiatrique Française (EPF) datent de la fin 1984.
Il a évoqué l’essai franco-américain « Princeps » avec le début de l’utilisation de l’AZT en prophylaxie. Il a rappelé qu’au fil des ans, on a assisté à une réduction extraordinaire du taux de transmission du virus de la mère à l’enfant (il est passé de 20% à moins de 1% pour la France métropolitaine). Parallèlement, la mortalité a également considérablement diminué. Face à ce constat se posent les questions suivantes :
-  *-Le problème est-il résolu ?
-  *-L’élimination de la transmission (« zéro nouvelle contamination ») est-elle une utopie réalisable ?
-  *-Est-ce la fin de la cohorte ?

Rappelons que cette cohorte observationnelle constitue un réseau unique au monde, avec le plus grands nombre de centres participants et le plus grand nombre d’inclusions. Tous les avis s’accordent à dire qu’il s’agit là d’un outil trop précieux pour être mis de côté, et qu’il faut continuer à l’alimenter. Les données obtenues, tant observationnelles que provenant d’études ciblées ou d’essais, pourront être intégrées au suivi de l’épidémiologie nationale, à l’étude de la tolérance des ARV ainsi qu’à la recherche de nouvelles stratégies préventives. Il faut d’ailleurs insister sur le fait que cette cohorte mère-enfant constitue un outil extrêmement intéressant dans l’évaluation de la toxicité des médicaments, et qu’elle bénéficie du soutien total de l’Agence du Médicament.

Les pratiques de PTME telles qu’elles apparaissent dans l’EPF
*— 60% des femmes commencent leur grossesse sous traitement ARV
*— le terme médian de début de traitement ARV pendant la grossesse est de 20-22 SA
*— on considère qu’un début de traitement est tardif lorsqu’il intervient entre la 28è SA et la 32è SA
- En France métropolitaine, 83% des femmes sont sous IP (82% dans les DOM mais le pourcentage de femmes non traitées pendant la grossesse est plus élevé)
*— on constate qu’il n’y a pas beaucoup de changements de traitements pendant la grossesse, les switch interviennent surtout au 1er trimestre ou alors en fin de grossesse si le traitement n’est pas bien équilibré
*— en pratique, pour les NRTI on observe une diminution de l’utilisation du Retrovir et de l’Epivir, le Tenofovir restant stable, et pour les IP on constate une diminution du Lopinavir au profit du Darunavir et de l’Atazanavir.
*— le Raltégravir reste très peu utilisé
*— Concernant la comparaison du taux de transmission du virus, il est de 0.54% en métropole et de 1.09% dans les DOM, ce qui représente une différence qui reste significative.
*— Pour le mode d’accouchement, il n’y a guère de différence entre la voie basse et la césarienne (50/50), avec dans les césariennes 20% de césariennes programmées sur utérus cicatriciel.
*— 93% des femmes ont eu une perfusion d’AZT au cours de l’accouchement
*— 98% des nouveaux-nés ont bénéficié d’une monothérapie par AZT à la naissance.
*— un quart des femmes stoppent leur traitement à l’issue de grossesse
*— peu de pathologies spécifiques sont observées pendant la grossesse, peu de manœuvres obstétricales à l’accouchement, quelques pathologies infectieuses sont rapportées après l’accouchement (en majorité chez les femmes césarisées)

L’EPF en chiffres
 _19451 inclusions
 _70% des femmes VIH en France font partie de la cohorte
 _44% de grossesses répétées
 _3/4 des femmes incluses sont originaires d’Afrique Subsaharienne
 _25% de primiparité
 _16% des femmes découvrent le VIH à l’occasion de leur grossesse
 _40% des femmes ont plus de 35 ans
 _2.5% de grossesses multiples
 _40% de femmes vivent et élèvent seules leur(s) enfant(s)
 _22% des femmes sont sans activité professionnelle et vivent souvent dans la précarité
 _ 18% des femmes n’ont pas révélé leur séropositivité à leur conjoint
 _ 72% des pères ont été testés avec 50% de sérologies négatives
 _ 0 transmission en 2011 !!!

Et puis en 2012 et 2013, oui…
Tolérance/efficacité des ARV

On utilise actuellement un certain nombre de médicaments sur lesquels on n’a que peu ou pas de données. Il faut donc que la cohorte génère ces données. Et l’EPF est un dispositif tout à fait adapté à l’évaluation de la tolérance et de l’efficacité des molécules administrées pendant la grossesse. De ce fait, la cohorte présente un intérêt certain pour les industriels, puisqu’elle leur apporte des données immédiatement utilisables. Ils proposent donc un soutien financier. Les avis de l’assistance s’accordent toutefois pour que soit maintenue une indépendance financière par rapport à l’industrie. Il faudrait pouvoir se contenter des financements académiques.
Le nouveau site internet
Un nouveau site internet EPF verra le jour en juin prochain. D’ici à la fin de l’année, des tableaux dynamiques d’indicateurs/site y seront disponibles.

2 – La tolérance des ARV
Ont été évoqués les thèmes suivants :
-  *-Incidence des cancers chez les enfants non infectés exposés : pour repérer ces enfants, on utilise les questionnaires EPF, les déclarations spontanées des cliniciens ainsi que le registre national français des cancers (croisement).
On sait concrètement que certaines molécules ont la capacité d’altérer l’ADN de la cellule. La concentration d’ARV est importante dans le liquide amniotique. Mais à ce jour, même si quelques cas ont été recensés, dont des cancers rares, il n’a pas été démontré que le risque de cancer chez les enfants exposés in utéro est augmenté.
-  *-Traitement ARV et malformations congénitales : Efavirenz associé aux malformations neurologiques ? Un taux élevé d’anomalies de fermeture du tube neural a été décrit chez le singe. AZT associé aux malformations cardiaques ? Rôle du sexe féminin dans la souffrance du myocarde ?
-  *-Comment évaluer le devenir à long terme des enfants non infectés ? Il faut repérer la survenue d’anomalies au-delà de l’âge de 2 ans. Le retard scolaire est également un indicateur très fort. Il faut noter que de plus en plus de femmes ont plusieurs enfants inclus dans l’EPF. Lors de la survenue d’une nouvelle grossesse, il faut profiter de l’occasion pour revenir sur la santé des enfants plus âgés (et surtout ne pas hésiter à déclarer les événements indésirables).

3 – Projets et perspectives
Les essais en cours (PRIMEVA) ou à venir (MONOGEST) dans le domaine de la PTME visent à proposer de nouvelles stratégies thérapeutiques. 60% des femmes en 2011 sont déjà traitées avant le début de leur grossesse. La clé de l’efficacité du traitement ARV est le contrôle de la CV.
Alors pourquoi ne pas proposer une simplification thérapeutique pendant la grossesse par IP boosté sans analogue nucléosidique ?
Il est également prévu d’étudier la pharmacocinétique du Raltégravir au cours du 3ème trimestre de la grossesse (entre la 30ème et la 37ème semaine).

4 – Divers
Ont également été discutés les points suivants :
-  *-Le passage dans un service d’adultes des adolescents VIH
-  *-L’état immunitaire de ces jeunes patients et leur qualité de vie
-  *-L’intérêt, notamment sur les réservoirs, d’instaurer un traitement ARV avant l’âge d’un an chez les nourrissons infectés
-  *-La possibilité de supprimer la perfusion d’AZT systématique au cours de l’accouchement : en effet, il semblerait que la majorité des femmes ayant une CV bien contrôlée, seraient éligibles pour accoucher sans perfusion d’AZT. Cette décision doit toutefois être prise en équipe à la lecture des éléments du dossier, dans les centres bien organisés.

Toutes les communications seront mises en ligne sur le site de l’Unité 569 de l’INSERM consacré à l’Enquête Périnatale Française.

V.Walter TEC à StMartin. 17 avril 2013

A lire également

article sur les malformations congénitales et antiretroviraux en pièce jointe

Les conclusions de l’étude sont les suivantes :

*-Eviter l’EFAVIRENZ pendant la grossesse lorsque c’est possible et le surveiller attentivement dans les pays qui n’ont d’autres traitements .
*-L’AZT donné le premier trimetre de la grossesse est responsable d’anomalies cardiaques.
*-Les bénéfices de ces traitements sur la réduction de la transmission de la mère à l’enfant dépassent de loin les effets secondaires.